- dénûment
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• XIVe, -1680; de dénuer♦ État d'une personne qui est dénuée du nécessaire. ⇒ besoin, indigence, misère, pauvreté. Être dans un grand dénuement. « ne plus posséder d'argent, ce n'est qu'une des étapes du dénûment » (Colette). — Fig. Un grand dénuement moral. ⊗ CONTR. Abondance, richesse.⇒DÉNUEMENT, DÉNÛMENT, subst. masc.A.— État de ce qui est dénué.1. État de (ce) qui est dépouillé des biens matériels, des choses nécessaires ou considérées comme nécessaires à la vie. (Quasi)synon. privation extrême, grande misère; (quasi-)anton. abondance, profusion, richesse.a) [En parlant d'une pers.] Les sites où ils [des misérables hères des villes] vivent et qui sont forcément appropriés à leurs dénûments et à leurs besoins (HUYSMANS, Art mod., 1883, p. 269). La pauvreté d'abord, puis le dénuement, puis la misère (ARNOUX, Roi, 1956, p. 66) :• 1. ... ma mère (...) est dans le plus affreux dénuement, ainsi que moi qui ai encore pour cent cinquante mille francs de dettes et qui travaille nuit et jour pour les payer.BALZAC, Corresp., 1841, p. 287.b) P. ext. [En parlant d'une chose concr., en gén. d'une habitation, d'une pièce] État misérable. Le dénûment absolu des deux chambres de cette mansarde, où il n'existait qu'une méchante table, le lit de sangle et deux chaises (BALZAC, Cous. Bette, 1846, p. 60). Elle m'entretient bien avec une certaine insistance de difficultés d'argent qu'elle éprouve, (...) en manière d'excuse et pour expliquer l'assez grand dénuement de sa mise (BRETON, Nadja, 1928, p. 59).2. P. métaph. [En parlant des sentiments, du cœur, de l'âme] État de ce qui est dépouillé d'un bien moral, d'une valeur abstraite. Ce qu'il serait simple alors de se réfugier dans un cloître! (...) quel dénuement cela suppose de l'âme vidée de toutes les idées profanes, de toutes les images terrestres (HUYSMANS, Cathédr., 1898, p. 350). L'élan passionné de cet enfant m'a fait sentir le dénuement de nos cœurs arides (BOURGET, Drame, 1921, p. 164) :• 2. ... la dureté de l'homme que je suis, le dénûment affreux de son cœur, ce don qu'il détient d'inspirer la haine et de créer autour de soi le désert, rien de tout cela ne prévaut contre l'espérance.MAURIAC, Le Nœud de vipères, 1932, p. 162.B.— État de ce qui est dénudé. (Quasi-)synon. dénudation, dénudement.1. Littér. [En parlant d'un élément de la nature] État de ce qui est dépouillé, de ce qui recouvre, de la végétation (cf. aussi décharné II A 2 p. anal. b, MICHELET, Oiseau, 1856, p. XLVI). Immense plaine, très rares arbrisseaux de loin en loin; ce dénuement magnifie encore les trois grands arbres du village (GIDE, Retour Tchad, 1928, p. 879). Le dénuement des terres craquantes (SAINT-EXUP., Citad., 1944, p. 754).2. Au fig. État de ce qui est dépouillé des éléments superflus, des ornements, de ce qui est (trop) pauvre, sec, sans ampleur.a) [En parlant d'une chose concr.] Je suis passé dans les salles de jeu — fasciné toujours par ce cérémonial sommaire, — ce dénûment essentiel du décor (GRACQ, Beau tén., 1945, p. 99).b) [En parlant d'une chose abstr., notamment du lang., des choses littér. ou artistiques] Le dénuement volontaire d'un tel écrit (BRETON, Nadja, 1928, p. 6). Le dénuement simplet, les charmes un peu maigres d'une idée platonicienne (GRACQ, Beau tén., 1945 p. 28).Prononc. et Orth. :[
]. S.v. dénuement ds Ac. 1718-1762 puis Ac. 1932; cf. aussi les dict. mod. tels que ROB., DUB., Lar. encyclop. et Lar. Lang. fr.; s.v. dénûment ds Ac. 1798 et 1835. Les 2 graph. sont admises ds Ac. 1878; cf. aussi DG, GUÉRIN 1892, Nouv. Lar. ill., Lar. 20e et QUILLET 1965. Ds LITTRÉ et Lar. 19e on réserve simplement à dénuement, considéré comme peu usité, une vedette de renvoi à dénûment. Au sujet de ce mot, cf. aussi dénouement. Étymol. et Hist. 1. 1374 « action de mettre à nu » desnuement du chief (J. GOULAIN, Ration., B.N. 437 [XIVe s.], f° 62c ds GDF. Compl.); 2. XVe s. [ms.] fig. (DUQUESNE, Hist. de J. d'Avesn., Ars. 5208, f° 108 r°, ibid.); av. 1704 « état de celui qui est dénué du nécessaire » (BOURD[ALOUE], Renonc. ds DG). Dér. du rad. de dénuer; suff. -ment1.
STAT. — Dénuement. Fréq. abs. littér. :330. Fréq. rel. littér. :XIXe s. : a) 393, b) 388; XXe s. : a) 445, b) 591.ÉTYM. 1374, desnuement; de dénuer.❖1 (Av. 1704). État d'une personne qui est dénuée du nécessaire. ⇒ Besoin, disette, misère, pauvreté. || Être dans un grand dénuement (→ Crever, cit. 17; blottissement, cit.). — REM. L'orthographe dénuement était inusitée au XIXe s. (Littré écrit dénûment, qu'on trouve encore au XXe s.).1 (Le serf) vit dans le dénûment, dans le silence, dans la stagnation, dans la fièvre, dans la fétidité, dans l'abjection, dans le fumier (…)Hugo, Post-scriptum de ma vie, Promontorium somnii, III.2 Mais ne plus posséder d'argent, ce n'est qu'une des étapes du dénûment.Colette, la Naissance du jour, p. 158.♦ Par ext. État de ce qui est dénudé. || Le dénuement d'une pièce, d'un logement : l'état misérable de cette pièce, de ce logement.2 (XVe). Fig. || Un grand dénuement moral.3 (…) la dureté de l'homme que je suis, le dénûment affreux de son cœur, ce don qu'il détient d'inspirer la haine et de créer autour de soi le désert, rien de tout cela ne prévaut contre l'espérance.F. Mauriac, le Nœud de vipères, 1932, p. 162, in T. L. F.❖CONTR. Abondance, profusion, richesse.
Encyclopédie Universelle. 2012.